LA LUNE ET LA TORTUE

La lune et la tortue... Aussi differentes que le jour et la nuit, que la France et le Japon...

08 mai 2006

Nezu Matsuri

Vendredi dernier, je me suis rendue à mon premier "matsuri". Les matsuri sont des festivals religieux - bouddhiste ou shintô, peut importe, très populaires parmi les Japonais. Ce jour-là, c'est l'occasion de participer à des rites religieux, d'acheter à manger dans les différents stand qui proposent des taiyaki, des takoyaki, des yakisoba... , de se retrouver en famille ou avec ses amis, d'admirer un feu d'artifice... Bref, vous l'avez compris, les matsuri sont de très grandes fêtes organisées autour d'un temple ou d'un sanctuaire.Les matsuri ont habituellement lieu en été. Vendredi, ça tombait bien, il faisait vraiment très chaud, on s'y serait cru.





(je sais, on ne voir rien sur ce plan)

Vendredi, c'était le sanctuaire de Nezu qui organisait son matsuri. Nezu est un petit quartier très mignon de Tôkyô, pas très loin du parc Ueno. Il n'y a pratiquemment aucun gratte-ciel, on y trouve au contraire de très vieilles maisons en bois, de petites rues toutes fleuries. J'aime beaucoup ce quartier.

Voila la foule qui fait la queue pour aller prier au sanctuaire. Bien que l'on parle du sanctuaire de Nezu, il allie à la fois des éléments shinto et des éléments bouddhistes. Vous voyez ces svastikas parmi les ornements ? C'est assez choquant les premières fois, mais on s'y fait. Il s'agit d'un symbole religieux bouddhiste que l'on retrouve souvent parmi les ornements des temples. Il est même utilisé sur les plans pour indiquer les temples bouddhistes. Je vous conseille de lire cet article très intéressant à ce sujet.

Le matsuri de Nezu est également célèbre pour son montreur de singe. Un singe vraiment intelligent, capable de comprendre beaucoup de mots et d'ordres différents (lève-toi, salue, lève la main droite, lève la main gauche, croise les jambes, saute, attrape, dis au revoir...).

Mais en même temps, il a ces yeux, ce regard à la fois intelligent mais complètement vide. Il a l'air tellement triste... Ce singe au bout d'une corde, c'est un peu comme si on avait attaché notre cousin et que l'on forçait à s'abaisser en faisant le clown. Il est trop intelligent pour mériter ça, c'est comme s'il comprenait que sa vie n 'a aucun sens. Une vie d'esclave qui n'espère même plus. Je me demande ce que les dresseurs font d'eux lorsqu'ils deviennent trop vieux pour faire leur numéro...

Et puis j'ai horreur des singes avec des vêtements. La pub pour la lessive Omo est un véritable cauchemar pour moi. Je trouve ça tellement ridicule et dégradant. Pauvres bêtes...

En tout cas, ça a beaucoup plu aux enfants.

Ce type se fait une fortune sur le dos de son singe : tout le monde (sauf moi et les enfants, évidemment) jette un billet de 1000 yens (= 7 euros) dans sa corbeille à la fin ! La corbeille en est remplie. Il y avait même des billets de 5000 yens !

Une autre attraction pour les enfants, ce sont ces petits bassins de polystyrènes remplis d'eau et de poissons rouges.


C'est un peu comme la pêche aux canards dans les fêtes foraines françaises... mais c'est bien plus dangereux pour ces pauvres poissons rouges... Les enfants reçoivent une petite épuisette dont le filet est une feuille de papier, ou bien un biscuit en forme de petite coupe. Le but est d'attraper le plus de poissons possibles sans que la feuille trempée ne se déchire ou que le biscuit ne se dissolve. A la fin, les enfants remportent les poissons qu'ils ont attrapés. C'est papa et maman qui vont être contents !

Il y avait un autre bassin où l'on pouvait aussi attraper des têtards et des petites tortues aquatiques. C'est assez cruel, vous ne trouvez pas? Surtout pour les tortues qui passent leur journée à tenter d'escalader le rebord de polystyrène pour reprendre pied un instant. Ils semblent que les Japonais aient des progrès à faire en ce qui concerne les droits des animaux. Et encore, pour le moment, on ne parle que de poissons rouges. Attendez que l'on aborde le sujet de la chasse "scientifique" à la baleine...

Enfin, le meilleur pour la fin: à Nezu, on peut assister à des représentations de taiko. "Taiko" (太鼓 : 太 = tai = gros; 鼓 = ko = tambour) est un mot générique qui désigne tous les types de tambours japonais. Il en existe cependant différentes sortes avec des tailles très variées. On pense que ces tambours sont utilisés depuis plus de 2000 ans au Japon. Ils étaient dès le 16ème siècle utilisés sur les champs de bataille afin d'intimider l'ennemi, transmettre des messages aux combattants et coordonner les mouvements des troupes.

Les taiko étaient également utilisés durant les rites religieux shinto et bouddhiste. Durant ces rites on ne jouait que d'un ou deux taiko: les ensembles n'existaient pas encore. Seuls des hommes choisis par les prêtres avaient le droit de jouer. On trouve encore aujourd'hui des taiko dans les temples et dans les sanctuaires.

Les ensembles contemporains de taiko sont appelés "kumi-daiko" (組太鼓: 組 = kumi = association, assemblée; 太鼓 = daiko = tambour). Ils ne sont apparus qu'au début des années 1950. C'est Daihachi Oguchi, un batteur de jazz, qui est à l'origine du style utilisé par les kumi-daiko. Oguchi avait décidé de jouer du taiko pour les cérémonies du sanctuaire Osuwa mais il a rendu les rythmes plus "jazzy". Il s'est ensuite demandé pourquoi on ne jouait jamais du taiko en ensemble et a rompu avec la tradition en créant le premier kumi-daiko. Aujourd'hui, le taiko est très populaire: on dénombre plus de 8000 kumi-daiko au Japon.

Dans le taiko que j'ai vu à Nezu, il y avait deux enfants qui ont fait pleurer les grands-mères quand ils ont joué. Mais à ma grande surprise, la plupart des joueurs étaient des adolescentes. Les deux petits mis à part, il n'y avait que deux garçons pour huit filles.

Comme vous pouvez le constater, ils sont très très forts. Ils jouent à une vitesse incroyable. Le son du tambour s'accompagne de cris poussés par chacun des musiciens. Cela ne se voit pas trop sur la vidéo, mais ils se regardent sans arrêt les uns les autres: j'imagine qu'ils ont une technique pour savoir ce que les autres vont faire ou ce qu'ils doivent jouer... Mais on a l'impression qu'ils improvisent sans arrêt. Ils dansent également en jouant, font de grands moulinets avec les bras. Parfois, ils sautent en tournant sur eux-mêmes. C'est très agréable à regarder et à écouter, je ne me lassais pas. En plus, ils ont l'air de beaucoup s'amuser: ils n'arrêtaient pas de rire tout en jouant. Je suis toujours aussi impressionnée.

Allez, je mets une autre vidéo pour les futurs fans inconditionnels. Si cela vous lasse, pas la peine de regarder.



Et un public captivé...

Tous droits réservés